
Accompagner en douceur nos enfants vers une alimentation faite « maison »
Tu es en pleine transition pour passer d’une alimentation industrielle transformée à du fait-maison ? Tu « pratiques » le fait-maison mais tes enfants vivent mal de ne pas avoir la même marque de biscuits que leurs copains ? Interview d’une coach parentale pour t’aider à changer les habitudes alimentaires de tes enfants en douceur.
S’il y a de quoi se préoccuper pour la santé de tous, des parents de plus en plus nombreux s’inquiètent des effets des aliments ultra-transformés sur la santé de leurs enfants. Quand cette prise de conscience entraîne des changements profonds dans la façon de s’alimenter d’une famille, la question se pose rapidement de savoir comment accompagner ce changement en douceur pour nos enfants.
C’est pour trouver des pistes d’action simples mais efficaces que je me suis tournée vers Céline Syritellis, coach parentale et auteure du blog Paizi. Sa mission est d’accompagner les parents qui sont fatigués de crier sur leurs enfants, en leur proposant des solutions adaptées à leur famille et à leurs besoins. Je lui ai donc demandé comment s’y prendre pour réussir à prendre soin de la santé de nos enfants… sans y laisser la paix familiale !
Du temps, de l’implication et de l’exemple
Céline, quels conseils donnerais-tu aux parents qui sont motivés pour passer au « fait maison » mais craignent de chambouler les habitudes alimentaires de leurs enfants, attachés à telle marque de biscuits, telle couleur de yaourt ou telle texture de compote ?
Je dirais qu’il y a deux grands cas de figure, celui des tout-petits de moins de 3 ans, et celui des enfants plus âgés, et notamment au-delà de 4-6 ans.
Pour des enfants qui ont intégré dans leurs découvertes gustatives et premières habitudes alimentaires des produits industriels que vous souhaitez remplacer par du fait maison ou d’autres alternatives plus saines, le facteur temps joue évidemment un rôle important dans le changement d’habitude. Ce temps sera réduit pour les moins de 3 ans, alors que le changement aura un impact plus important pour les habitudes ancrées depuis plus longtemps chez les plus grands.
Mais d’abord, je tiens à dire que ce changement gagnerait à ne pas faire l’objet de craintes a priori pour les parents. Changer ses habitudes alimentaires constitue un projet positif pour nos enfants – et pour nous adultes aussi ! – qui sera à coup sûr l’occasion de découvertes et expériences enrichissantes.
Je dirais qu’il y a 3 attitudes, toujours vertueuses avec les enfants, qui pourraient guider les parents :
- Se laisser le temps de faire ce changement
- Impliquer les enfants, même tout petits
- Ne pas sous-estimer la force de l’exemple.

Concrètement, que signifie « Se laisser le temps de faire ce changement » ?
Ce pourrait être d’avancer progressivement, par étapes, dans ce changement. Plutôt qu’une révolution totale, qui pourrait s’avérer déstabilisante pour les petits, avancer par petits-pas permet d’accompagner les enfants qui craindraient de perdre leur « madeleine de Proust » !
Selon ce que l’on veut changer, on pourra choisir de commencer par une catégorie d’aliments (les desserts, les biscuits apéritifs…) ou alors par un repas (biscuits du goûter, céréales du petit-déjeuner…). Un changement en douceur pourra aussi consister à s’attaquer plus progressivement encore aux aliments que votre enfant a l’habitude de consommer quotidiennement. Par exemple, s’il a toujours trouvé une compote en gourde dans son sac à goûter, le changement pourra consister dans un premier temps à introduire des compotes maison lors des goûters du week-end.
Passer au fait-maison sera plus facile s’il est possible de « coller » au maximum aux produits industriels auxquels vos enfants se sont peut-être habitués. Ce pourra être par exemple de permettre à l’enfant de retrouver la texture finement mixée de sa gourde de compote ou de garder le parfum chocolat de sa boisson au lait du matin. Cela nécessite d’être assez confiant pour oser laisser le temps aux enfants d’apprendre à aimer de nouvelles saveurs ou nouvelles textures. Ne nous formalisons pas d’un refus de l’enfant après une première tentative – souvent grandement investie par les adultes qui se sont collés aux fourneaux ! Cela évitera de faire ce changement « aux forceps » !
Et donc, impliquer les enfants permettra de les rendre acteurs de ce changement ?
Oui, c’est toujours une bonne option ! Pour ce qui est de l’alimentation, les impliquer dans la préparation des repas offre des occasions de voir, toucher et bien sûr de goûter, qui permettent de les reconnecter à ce qui compose leur alimentation. Et de ce point de vue, c’est un point sur lequel l’alimentation industrielle, prête à manger, ne peut pas rivaliser ? !
Pour les plus grands, les impliquer dans la recherche d’alternatives, que ce soit des recettes de « fait-maison » ou des produits aux ingrédients moins controversés permet d’éviter les oppositions à des changements imposés.

Comment surfer sur ce que tu appelles « la force de l’exemple » ?
Certains auteurs appellent « éducation silencieuse » cette éducation implicite, qui ne passe pas par ce qu’ont dit à nos enfants, mais à ce qu’on leur montre à travers nos choix, nos attitudes ou nos comportements. Elle est déterminante dans le domaine de l’alimentation. Combien de parents regrettent que leurs enfants n’aiment pas les fruits, alors qu’eux-mêmes les boudent ?
Nos préférences alimentaires influencent bien souvent nos enfants. C’est pourquoi il est important d’appréhender des projets de changements d’habitudes alimentaires à l’échelle de toute la famille. Ces périodes de tests, de découvertes et d’expérimentations, gagneront à être vécues en famille ! D’ailleurs, ne pas faire « deux poids, deux mesures » entre les aliments qu’on leur réserve (biscuits maisons, yaourts sans colorants) et ceux qu’on s’autorise (crèmes dessert au chocolat, biscuits apéritifs) sera vertueux pour la santé des parents aussi !
Et comment peut-on faire pour des enfants plus grands ?
Ces conseils valent tout à fait pour des enfants plus grands, et pourraient même être plus déterminants que pour les plus petits. Je parlais de la force de l’exemple. Elle a une influence sur les petits mais des enfants plus âgés auront même tendance à questionner ces écarts : « pourquoi tu nous dis de manger des fruits alors que toi tu prends du chocolat ? ».
La plus grande ancienneté de certaines habitudes alimentaires chez les grands enfants, au-delà de 6 ans, impose plus encore de laisser du temps au temps pour amener ce changement sans en faire un nouveau sujet de bataille, déjà suffisamment nombreux dans nos familles !
Les problématiques des enfants de plus de 3 ans
Il y a cependant des problématiques spécifiques qui pourraient entrer en jeu plus fortement pour des enfants plus grands. Ce sont :
- les différences qu’ils peuvent constater dans d’autres environnements (chez les cousins, avec les copains…)
- la « déconstruction » de certains conditionnements liés au marketing de l’industrie agro-alimentaire.

Quand les enfants ont grandi, ils ont davantage tendance à questionner les différences entre ce qui se passe dans leur famille et ce qu’ils observent à l’extérieur. Qu’ils aient toujours connu une alimentation « nature » ou « maison » ou au contraire s’ils ont longtemps connu les biscuits industriels, il y a peu de chance que ces écarts leurs échappent !
« Pourquoi les copains ils ont des bonbons ? »
« Pourquoi mon sandwich il est pas dans un emballage ? »
« Pourquoi mon yaourt il a pas de couleur dedans ? »
Expliquer ses choix
Pour les parents, cela impose d’être en capacité d’expliquer le sens de la démarche et les raisons qui ont conduits à ces choix… sans que cela ne condamne les choix des familles des copains ! Par exemple, pour répondre aux questions de mes enfants, je leur ai expliqué que tous les parents préparent un goûter qui pourra faire plaisir à ses enfants, et que, de mon côté, je trouvais que les recettes des biscuits du supermarché ne respectaient pas assez ce qui compte pour moi (quantité et qualité du sucre, des matières grasses…). J’ai aussi profité de l’occasion pour vérifier qu’ils aimaient le goût de leur goûter ! ?
L’idée n’est pas de faire de l’alimentation une source d’inquiétude. C’est plutôt de s’intéresser à ce que l’on mange, à la façon dont c’est fabriqué et à ce qui le rend si bon. Nos enfants apprécient bien souvent de nourrir leur curiosité pour comprendre d’où vient tel ou tel aliment ?
Déconstruire les mythes du marketing
Il faut aussi dire qu’une différence majeure entre l’alimentation faite « maison » et l’alimentation industrielle réside dans l’emballage. Cela n’a pas échappé aux industriels qui exploitent cet espace d’expression pour donner le goût de ce qu’il contient, biscuit, crème ou compote !
Dans certaines familles, renoncer aux produits industriels ce sera aussi renoncer à son personnage préféré dessiné sur le paquet ou même les cartes, les magnets ou les autocollants qu’ils retrouvaient avec joie dans chaque nouvelle boîte. C’est un bon exemple des opportunités qu’offrent le passage au fait-maison : déconstruire le « conditionnement » marketing qui nous fait penser que c’est meilleur s’il y a notre héros préféré dessus ou si c’est « couleur » fraise.
Personnellement, j’estime qu’éduquer nos enfants aux rouages de la publicité et du marketing est une garantie de leur liberté future, dans une société où tout porte à croire qu’il nous reste mille et un besoin et désirs à satisfaire… pour faire grossir le portefeuille des industriels !
Merci Céline pour tous ces conseils !
Je vous invite à visiter le site Paizi de Céline, qui regroupe de nombreux conseils et pistes pour les parents. Et si vous voulez préserver ou retrouver un quotidien paisible avec vos enfants, faites appel à elle les yeux fermés : elle est géniale !

